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Sète : Pourquoi le Rio Tagus est-il bloqué à quai depuis 11 ans ?

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Le Rio Tagus se dégrade sur les quais du port de Sète-Frontignan depuis novembre 2010. Le 20 juin, le remorquage de l’épave a été tenté. En vain. Retour sur les raisons de cette déconvenue.

Immobilisé en 2010 par le centre de sécurité des navires après inspection, le Rio Tagus n’est jamais reparti. Le bateau, qui débarquait de l’engrais, n’était pas suffisamment entretenu, ce qui pouvait engendrer des problèmes de sécurité de navigation. Olivier Carmes, directeur général du Port de Sète-Frontignan, retrace les tentatives du port pour se débarrasser du Rio-Tagus.

« On a organisé 3 ventes aux enchères. En 2016, un propriétaire espagnol -l’entreprise Varadero- a décidé d’acheter le Rio-Tagus pour 11 000€. Il devait le remorquer sur son site de démantèlement près de Barcelone. L’entreprise avait commencé la dépollution du navire : pompage des eaux de cale, retrait des déchets, etc. Pour suivre la réglementation française et européenne, Varadero a réalisé toute une procédure pour classifier le Rio-Tagus en déchet ferraille avant l’exportation. Lorsqu’il a estimé que son dossier était complet, il a amené un remorqueur sur notre site pour déplacer le Rio Tagus de Sète à Barcelone. Malheureusement, l’État français estimait que toutes les dispositions sécuritaires n’étaient pas réunies et a interdit le départ du navire. S’en est suivi un litige entre l’État et le propriétaire du navire, qui l’a à nouveau abandonné », détaille-t-il.

C’est donc le Port de Sète-Frontignan qui s’est substitué au suivi quasiment quotidien du Rio Tagus pour s’assurer de sa bonne flottaison. Olivier Carmes poursuit : « Il y a un an, après plusieurs procédures vaines, la région Occitanie a eu gain de cause. Le tribunal administratif de Montpellier lui a rendu un jugement qui stipulait la libération du quai aux frais et risques de la société propriétaire du Rio-Tagus. La région a donc décidé d’engager des frais de démantèlement et de poursuivre Varadero pour tenter de couvrir les frais. En parallèle, elle a lancé des consultations pour avoir des propositions d’entreprises et des solutions techniques pour démanteler le Rio Tagus. C’est la proposition de transporter le Rio-Tagus en flot-flot, c’est-à-dire sur un autre navire au lieu de le faire flotter, qui a été retenue. Cette solution nous semble la plus complète et la moins risquée au niveau environnemental et sécuritaire. »

Les eaux de ballast : cause du fiasco de l’opération

C’est la société Navaleo qui a remporté l’appel d’offre et a donc affrété le Yacht Express pour qu’il assèche le Rio-Tagus dans sa cale. Une escale de 2 jours était prévue à Sète pour charger le Rio-Tagus sur le Yacht Express, qui remontait vers son chantier de démantèlement, à Brest. « La mise au sec du Rio-Tagus dans le Yacht Express nécessitait de rétablir l’inclinaison du navire, qui gitait sur l’arrière. Le problème est que le Rio-Tagus prend l’eau. Ses cloisons ne sont plus étanches et sa coque se désintègre. De plus, il y a eu des montées d’eau importantes récemment, dues aux épisodes pluvieux. Malheureusement, bien qu’on pompe régulièrement les eaux de ballast de ce navire, lorsqu’on a modifié sa gite, on a constaté qu’elles fuyaient », explique-t-il. « Contrairement à certains dires, ces ballasts n’ont en aucun cas été déversés délibérément », précise M. Carmes.

Les eaux de ballast sont des eaux souillées et rouillées qui peuvent contenir des résidus d’huiles. Une fois libérées, elles endommagent la faune et la flore marine. « Dès que la capitainerie s’est aperçue de la fuite, elle a immédiatement déployé un barrage anti-pollution. Ensuite, notre nouveau navire dépollueur a pompé le résidu de la fuite », affirme Olivier Carmes.« Concernant le Rio-Tagus, on a décidé de colmater la coque. Cependant, les travaux requièrent un délai bien plus important que les 2 jours d’escale initialement prévus. Affréter le Yacht Express est extrêmement onéreux, c’est pourquoi on préfère attendre le prochain passage du Yacht Express, prévu pour août ou septembre. Pendant ce temps, Navaleo continue la préparation du navire pour son remorquage », explique Olivier Carmes.

Le directeur général du port reste optimiste

« On commence à arriver à la fin et on espère que la prochaine opération sera la bonne. Le port Sète-Sud de France, gestionnaire des ports de commerce, de pêche et de plaisance, est très satisfait de la décision de la région Occitanie. On la remercie quant à la prise en charge du navire et de cette opération très coûteuse en plus de la gestion des procédures judiciaires de recours vis-à-vis du propriétaire actuel », déclare M. Carmes. « Le plus gros risque est que le Rio-Tagus finisse par couler. Il est nécessaire de s’en débarrasser. On avait pris toutes les précautions nécessaires mais quand le bateau reste à quai et n’est plus hermétique, on se retrouve face à des mauvaises surprises. On ne peut pas garantir qu’on a éradiqué toute la pollution mais on a tout fait pour », indique-t-il.

Le gisement de cette épave affecte aussi l’économie. En effet, les quais immobilisés par le Rio-Tagus pourraient être exploités par les plaisanciers et pêcheurs. « On a un problème au niveau national et européen en ce qui concerne les saisies des navires. On n’arrive pas à s’en sortir. Les procédures sont longues et coûteuses. On a souvent peu de recours par rapport aux propriétaires qui ont différentes nationalités. Des épaves, tous les ports en ont, » conclut Monsieur Carmes.

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