Narcotrafic en France : un projet de loi controversé divise l’Assemblée nationale
Bruno Retailleau et Gérald Darmanin défendent des mesures fortes, mais les débats s’annoncent tendus face à une opposition critique et des divisions au sein de la majorité.
Les députés entament cette semaine un débat crucial sur une proposition de loi visant à renforcer la lutte contre le narcotrafic en France. Porté par Bruno Retailleau, ministre de l’Intérieur, et Gérald Darmanin, ministre de la Justice, ce texte, adopté à l’unanimité au Sénat en février, suscite désormais des tensions à l’Assemblée nationale. Alors que certains articles ont déjà été supprimés en commission, les deux ministres espèrent rétablir des mesures controversées, notamment celles concernant l’accès aux communications chiffrées et la création de quartiers d’isolement pour les trafiquants les plus dangereux.
En commission, le texte a été adopté avec le soutien du Rassemblement national et de la majorité présidentielle, mais les socialistes, écologistes et communistes se sont abstenus, tandis que La France Insoumise a voté contre. Parmi les mesures retirées figurent l’obligation pour les plateformes de messagerie chiffrée de permettre l’accès aux correspondances des trafiquants, ainsi que la création d’un « dossier coffre » pour stocker des informations d’enquête sans les rendre accessibles aux avocats de la défense. Ces dispositions, jugées contraires au principe du contradictoire, ont été vivement critiquées par de nombreux parlementaires.
Bruno Retailleau, qui voit dans ce texte une opportunité de renforcer l’arsenal juridique contre le narcotrafic, a appelé à un « sursaut » des députés. « Nous ne luttons pas à armes égales », a-t-il déclaré, soulignant l’urgence de doter l’État d’outils efficaces. Pour Gérald Darmanin, la création de quartiers d’isolement pour les trafiquants les plus dangereux est une priorité, bien que cette mesure ait provoqué des crispations, notamment chez les socialistes. Le ministre de la Justice soutient également la généralisation de la visioconférence pour les détenus de haute sécurité et l’extension de la durée de garde à vue pour les « mules ».
Les oppositions, quant à elles, dénoncent un texte « inefficace et dangereux ». Manuel Bompard, député de La France Insoumise, a critiqué une approche sécuritaire qui ne résoudrait pas les problèmes de fond. François Ruffin, ex-LFI désormais proche des écologistes, a fustigé « l’improvisation tous azimuts » de Gérald Darmanin, rappelant ses échecs passés dans la lutte contre le narcotrafic.
La mobilisation des groupes de la majorité sera déterminante pour l’issue des débats. Bruno Retailleau a exprimé sa confiance dans le soutien des députés LR, tandis que Gérald Darmanin a multiplié les rencontres avec les représentants des différents groupes, y compris ceux de l’opposition. Les discussions promettent d’être animées, avec des enjeux politiques et sécuritaires majeurs pour le gouvernement.